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Disparition de Bernard Dadié, Illustre et Majestueux Père des Lettres Ivoiriennes

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Disparition de Bernard Dadié, Illustre et Majestueux Père des Lettres Ivoiriennes

Message par Beauté Nubienne » mars 10, 19 7:58 pm

http://www.rfi.fr/afrique/20190309-disp ... oete-theat

Disparition de Bernard Dadié, Illustre et Majestueux Père des Lettres Ivoiriennes


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Par Tirthankar Chanda Publié le 09-03-2019 Modifié le 09-03-2019 à 21:38


L'immense Bernard Dadié vient de décéder à l’âge vénérable de 103 ans, a annoncé ce samedi le ministre ivoirien de la Culture, Maurice Bandaman. Personnage de nombreux talents, l'Ivoirien fut poète, romancier, homme de théâtre, mais aussi homme politique et ministre de la Culture sous Houphouët-Boigny. Proche du Front populaire ivoirien, il avait pris fait et cause pour Laurent Gbagbo alors que celui-ci était incarcéré depuis 2011 au centre de détention de la CPI, à La Haye (Pays-Bas). L'auteur de Climbié et d'autres opus devenus des classiques de la littérature africaine, fut le premier écrivain africain dont on a célébré le centenaire de son vivant.
Rendant hommage à l’aîné à l’occasion de son centenaire en 2016, le romancier Koffi Kwahulé écrivait dans Jeune Afrique : « Dadié est à la littérature ce qu’Houphouët est à la politique. » Autrement dit, un ancêtre incontournable. Voire même la matrice à partir de laquelle la littérature ivoirienne est née. « Ecrire est, pour moi, un désir d’écarter les ténèbres, un désir d’ouvrir à chacun des fenêtres sur le monde », avait déclaré l’écrivain lors de la cérémonie du centenaire. Malgré son grand âge, le doyen des lettres africaines était venu personnellement, jeudi 11 février 2016, au Palais de la culture d’Abidjan pour recevoir le premier prix James Torres Bodet que l’Unesco lui avait décerné en hommage à sa longue carrière d’écrivain.

La particularité de Bernard Dadié est d’avoir pratiqué tous les genres, de la poésie à l’essai, en passant par la fiction, le théâtre et le conte. Il avait tout inventé. L’homme avait coutume de collectionner les premières places. Climbié, son roman sans doute le plus connu, publié en 1956, est le premier ouvrage de fiction ivoirien. Avec sa pièce Les Villes, jouée à Abidjan en avril 1934, Dadié a donné la toute première pièce de théâtre du corpus dramatique de l’Afrique francophone. Enfin, last but not least, il fut le premier et le seul à remporter deux fois le grand prix littéraire de l’Afrique noire, la première fois en 1965 avec son roman Patron de New York, et la deuxième fois en 1968 avec un autre roman La Ville où nul ne meurt.

L’autre trait marquant de l’œuvre de Bernard Dadié, c’est son refus de la « négritude » comme source d’inspiration, tranchant ainsi avec l'idéologie chère aux grands Africains de à sa génération. Pour lui, écrit Nicole Vinciléoni, spécialiste de la littérature ivoirienne, « l’Afrique est un vécu et non une nostalgie. C’est donc avec un cœur trop africain pour avoir à clamer son africanité qu’il regarde le monde […] »

« Le Victor Hugo de la Côte d’Ivoire »

Bernard Dadié n’a certes pas été le Senghor de la Côte d’Ivoire, mais il fut son Victor Hugo, toutes proportions gardées. Ecrivain précoce, il est entré en littérature très tôt, composant son premier texte de théâtre, Les Villes, en 1931, à l’âge de 15 ans, lorsqu’il est encore élève à l’Ecole primaire supérieure de Bingerville. A 21 ans, il participe à la composition d’une saynète inspirée de la cosmogonie agni, baptisée Assemien Dehylé roi du Sanwi (Ceda, 1979). La pièce fut jouée en 1937 au théâtre des Champs-Elysées de Paris, à l’occasion de l’Exposition universelle. Depuis, l’Ivoirien n’a jamais cessé d’écrire et a produit une vingtaine de livres, tous genres confondus. Son œuvre raconte les combats de son peuple, ses légendes et ses aspirations que l’écrivain a lui-même incarnées en tant que militant anti-colonial, avant de participer à la vie politique en tant que, notamment, ministre de la Culture de Houphouët-Boigny.

Né en 1916 à Assinie, non loin d’Abidjan, sur les rives de l’Atlantique, le futur écrivain a grandi dans une famille où combats politiques et engagement n’étaient pas de vains mots. Son père était fondateur du premier syndicat agricole africain. Ce père combatif, qui tenait tête aux fermiers blancs et à l’administration coloniale, s’était pourtant assuré que son fils soit éduqué à l’occidentale en l’inscrivant à l’école française. Après de brillantes études primaires et secondaires, celui-ci partit parfaire son éducation au début des années 1930 à la prestigieuse école William-Ponty à Dakar, par laquelle ont transité de nombreux dirigeants de l’Afrique indépendante. A sa sortie de l’Ecole, il fut affecté à l’Institut français d’Afrique noire (IFAN) et passa dix ans au Sénégal, avant de regagner définitivement son pays à la fin de la Seconde Guerre mondiale.

A son retour en Côte d’Ivoire en 1947, Dadié s’engagea dans l’activisme anticolonial, au sein du Rassemblement démocratique africain (RDA), formation créée sous l’impulsion de Félix Houphouët-Boigny. Au sortir de la Seconde Guerre mondiale, avec le retour au pays des soldats africains qui avaient participé aux batailles sur les fronts européens et avaient vu l’Europe se déchirer dans une longue et terrible guerre fratricide, les colonies africaines furent secouées par de timides mouvements de libération. Avec ses compagnons de lutte pour l’indépendance, Dadié fut arrêté et emprisonné en 1949 pour « activités anti-françaises ». Il fera seize mois de prison, avant d’être relâché au bénéfice d’un non-lieu.

Le jeune homme, traumatisé par son passage dans la lutte politique militante, se réfugiera alors dans l’écriture, son premier amour. Il va désormais exprimer son engagement aussi à travers la littérature, tout en menant parallèlement une vie professionnelle et politique intense au sein de l’administration ivoirienne.

L'engagement politique de Dadié le conduisit des cabinets ministériels au gouvernement. Il fut l'un des piliers de l’administration culturelle ivoirienne pendant la longue présidence d’Houphouët-Boigny. D’abord chef de cabinet du ministre de l’Education nationale, puis directeur des services de l’information (1959-61), directeur des Beaux-Arts (1962-63) et des affaires culturelles (1973-1976), il finira sa carrière politique en tant que ministre de la Culture et de l’Information, poste qu'il occupa entre 1977 et 1986. Pendant ces neuf années à la tête de ce ministère sensible, Dadié favorisa l'épanouissement de la presse libre et libéralisa les pratiques artistiques et culturelles.

Lucide et impitoyable

C’est aussi au cours des années 1950 à 1980 que Bernard Dadié produisit l’essentiel de son œuvre littéraire. Il se fit d’abord connaître comme poète, avec la publication à Paris, en 1950, de son recueil de poèmes au titre évocateur, Afrique debout (Seghers). Les poèmes au ton martial et à la formulation dépouillée répondent en écho aux luttes des hommes noirs asservis et proclament le caractère inéluctable du changement à venir. « Les rois du pétrole et du fer/ Les princes du diamant et de l’or/ Les barons du bois et du caoutchouc/ Veulent me dompter », mais « Nous les empêcherons de nous mettre le bâillon », clame le poète.

Les ouvrages se succèdent et ne se ressemblent pas. Au cours des deux décennies qui suivirent, Bernard Dadié était au sommet de son art et publia l’essentiel des ouvrages qui ont fait sa renommée. Dans ses premiers livres de contes, Légendes africaines (Seghers, 1954) et Le Pagne noir (Présence Africaine, 1956), puisant dans la longue tradition orale africaine, il transmet les sagesses tirées du passé de son peuple et mêle - avec brio – le fantastique, le réalisme et le lyrisme. La restitution et la transmission des récits anciens constituent un pan majeur de l’œuvre de Bernard Dadié, qui n’eut de cesse de répéter que seuls les peuples enracinés dans leur passé savent où ils vont, même lorsqu’ils ont subi les outrages les plus terribles.

Paru en 1956, Climbié (Seghers), à mi-chemin entre roman et chronique autobiographique, raconte, tout comme les autres romans de formation de l’époque coloniale, les dramatiques dilemmes identitaires de la jeunesse noire alphabétisée. Celle-ci est tiraillée entre les valeurs africaines de ses ancêtres et les fétiches de sa civilisation que l’Europe tente de lui imposer à travers ses écoles, sa puissance et sa domination. Tous les jeunes d’Afrique noire connaissent Climbié, devenu un grand classique de la littérature francophone.

Enfin, le trio Un Nègre à Paris (Présence Africaine, 1959), Patron de New York (Présence Africaine, 1964) et La Ville où nul ne meurt (Présence Africaine, 1969), productions emblématiques de cette période faste, mettent en scène avec une délectation ironique et moraliste la confrontation de l’homme africain avec les métropoles occidentales (Paris, New York et Rome), avec leurs modernités ombrageuses et leurs faux-fuyants. L’auteur donne dans cette trilogie originale toute la mesure de son talent de critique sociale, aussi lucide qu’impitoyable.

Retour au théâtre et... à la politique

Dans les années 1970, Bernard Dadié renoua avec le théâtre, porte par laquelle il était entré en littérature dans sa jeunesse. Il publiera successivement, aux éditions Présence Africaine, Monsieur Thôgô-Gnini (1970), une satire des mœurs coloniales, Béatrice du Congo (1970), une pièce historique sur la colonisation portugaise dans l’Afrique centrale, Iles de tempête (1973), drame en plusieurs tableaux consacré à la lutte de libération des Haïtiens, ainsi que d’autres pièces moins connues chez des éditeurs africains. Riche des ressources dramatiques africaines, le théâtre de Dadié plaît à un très large public et il a été joué sur des scènes internationales, à Paris, à Avignon et même à New York.

S’il n’a quasiment rien produit au cours des dernières décennies de sa vie, le centenaire n’avait rien perdu de sa combativité, comme en témoigne son intérêt persistant pour la vie politique dans son pays. N’avait-il pas récemment voué aux gémonies le chef de l'Etat ivoirien Alassane Ouattara, l'accusant de négliger la voix du peuple ? L’homme avait d’ailleurs depuis longtemps pris fait et cause pour Laurent Gbagbo, allant jusqu'à assumer dès 2002 la direction du Congrès national de résistance pour la démocratie (CNRD), mouvement mis en place par Simone Gbagbo pour la défense son mari. En 2016, à l’occasion de son centenaire, il avait lancé une pétition publique pour réclamer la libération de Gbagbo, rappelant que « depuis plus de cinq ans la CPI peine à apporter la moindre preuve matérielle au soutien des charges retenues contre Laurent Gbagbo ». La pétition avait recueilli 26 millions de signatures!

Les prises de position de Bernard Dadié contre le régime sahélien en place n'ont pas toutefois empêché le ministre de la Culture d'Alassane Ouattara de participer à la cérémonie de remise de prix à l'écrivain par l'Unesco, qui s'est déroulée à Abidjan le 11 février 2016. Sans doute parce que l'oeuvre littéraire de Dadié, reconnue dans le monde entier, n'appartient à aucun camp et dépasse les rivalités politiques du moment. On pourrait dire qu'elle n'est ni ouattariste, ni gbagboiste, en parodiant l'écrivain qui aimait répéter dans ses années de militantisme politique aux côtés de Félix Houphouët-Boigny qu'il n'était « ni houphouétiste, ni antihouphouétiste, mais tout simplement ivoirien » !
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Re: Disparition de Bernard Dadié, Illustre et Majestueux Père des Lettres Ivoiriennes

Message par Beauté Nubienne » mars 10, 19 8:01 pm

https://www.ivoiresoir.net/urgent-cote- ... ard-dadie/

Mort de Bernard Dadié à 103 ans ! L’information a été livrée ce samedi 9 mars 2019, par le journaliste-écrivain Serge Bilé, sur sa page Facebook.



« Quelle tristesse ! Quelle triste nouvelle !! Bernard Dadié est mort. Bon voyage tonton et merci pour tous tes écrits et pour ta droiture qui nous inspire. Tu rejoins tantie là-haut, ta chère Assamala qui t’attendait. Condoléances à mes cousins et cousines », a écrit Serge Bilé.

A lire aussi. Côte d’Ivoire : Qui veut tuer Bernard Dadié ?

Le plus célèbre des écrivains ivoiriens de tous les temps tirent ainsi sa révérence après 103 ans passés sur terre. Cet ancien ministre de la Culture et compagnon de lutte d’Houphouët-Boigny au PDCI (alors le principal parti anti-colonial), est l’auteur de plusieurs livres dont Climbié, Pagne Noir, Légendes africaines, etc. Lauréat du Grand prix littéraire d’Afrique noire, Dadié avait été annoncé à plusieurs reprises pour mort. En novembre 2018, sa famille avait fait un démenti suite à des rumeurs persistantes.

Pour les Ivoiriens comme de nombreux Africains, il s’appellait Bernard Dadié. Mais son vrai nom est Bernard Adou Koffi Binlin Dadié, fils de Gabriel Dadié qui fut lui aussi ministre et compagnon de la première heure d’Houphouët. Nous y reviendrons.

Elvire Ahonon
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Re: Disparition de Bernard Dadié, Illustre et Majestueux Père des Lettres Ivoiriennes

Message par Beauté Nubienne » mars 10, 19 8:08 pm

CÔTE D'IVOIRE : LE "TESTAMENT" DE BERNARD DADIÉ LAISSÉ A L'IMPOSTEUR USURPATEUR OUATTARA


Lire la suite sur : https://www.afrique-sur7.fr/418765-test ... e-ouattara

NEWS - Abidjan- Côte d'Ivoire : l''actualité économique et politique ivoirienne
Actualités >NEWS >Abidjan- Côte d'Ivoire : l''actualité économique et politique ivoirienne >
Auteur : Dreyfus polichinelle / Publié le : 10 mars 2019
0 vote(s)
Bernard Dadié s'est éteint, ce samedi 9 mars, à l'âge de 103 ans. Le plus illustre écrivain ivoirien part dans le monde de l'immortalité avec une vie pleine aussi bien de péripéties que de gloire. Il est toutefois demeuré un opposant à Ouattara.

Bernard Dadié a tiré sa révérence ce samedi


Il a définitivement déposé la plume, ce samedi. Affaibli ces dernières années par le poids de l'âge et quelques soucis de santé, Bernard Dadié rejoint les étoiles en ce jour. Comme le disait Amadou Hampaté Bâ : « En Afrique, un vieillard qui meurt est une bibliothèque qui brûle. »

L'écrivain Bernard Abou Koffi Binlin Dadié était certes un puits de savoir qui retourne dans l'éternité avec de multiples connaissances et expériences inégalées, il laisse cependant une bibliographie très enrichissante pour la postérité.

Né le 10 janvier 1916 à Assinie, le compagnon de lutte de Félix Houphouët-Boigny a été de toutes les luttes anticolonialiste. Ce qui lui a valu d'être emprisonné dans des conditions on ne peut plus insupportables.

Malgré son âge avancé, son engagement politique n'a jamais refroidi. Il ne cessait alors d'interpeller le Président Alassane Ouattara sur sa gouvernance en Côte d'Ivoire.

Dans une lettre ouverte qu'il a écrite en avril 2015, Bernard B. Dadié déclarait : « Que Ouattara se souvienne que le peuple de Côte d'Ivoire semble être son prisonnier, mais lui est prisonnier de ses propres turpitudes et avec lui ses parrains. Et quand le peuple se lèvera pour briser ses chaînes... ce qui ne saurait tarder. »

Notons par ailleurs que Bernard Dadié est, avec Joseph Koffigoh, ancien Premier ministre togolais, l'initiateur d'une pétition, qui a récolté plus de 26 millions de signatures à travers le monde, demandant à la Cour pénale internationale (CPI) de libérer Laurent Gbagbo.



Lire la suite sur : https://www.afrique-sur7.fr/418765-test ... e-ouattara
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Re: Disparition de Bernard Dadié, Illustre et Majestueux Père des Lettres Ivoiriennes

Message par Beauté Nubienne » mars 10, 19 8:17 pm

Dramane Alassane Ouattara ou la parfaite incarnation de Monsieur Thôgo-gnini

de Bernard Dadié

http://www.raphaeladjobi.com/archives/2 ... 01158.html

Image
Au début des années 70, Monsieur Thôgo-gnini, la pièce de théâtre de Bernard Dadié publiée en 1966 - qui fut présentée au festival d'Alger l'année suivante - connut quelque succès. A cette époque, dans le gros village de Bonoua, la petite troupe de collégiens et de lycéens qui - à l'imitation de leurs aînés - avait fait du recueil des pièces du "Cercle populaire ivoirien" leur bréviaire, avait découvert avec délectation le verbe frondeur de Bernard Dadié contre les nouveaux collaborateurs nègres des Européens. J'étais de ces jeunes là.

Quand en 2011, je vis Alassane Ouattara du haut de son piédestal, droit comme un i, déployer son bras dans toute sa longueur - comme pour tenir des ennemis à distance - tendre sa main aux rois Akans qui, dans une profonde génuflexion la prenaient à tour de rôle dans un geste de soumission, j'ai tout de suite reconnu Monsieur Thôgo-gnini, le personnage de Bernard Dadié ! L'inculture et la fanfaronnade s'accomplissent toujours dans l'arrogance et le mépris !

Dans la tradition Akan - et dans bien d'autres traditions ivoiriennes, et peut-être africaines - quelque soit son rang, on ne laisse jamais un vieil homme qui vous tend la main accomplir la totalité de sa génuflexion en signe de respect de votre titre. Cette politesse s'avère encore plus grande quand il s'agit de l'hommage d'une autorité à une autre. En interrompant le geste de soumission, celui qui reçoit les honneurs montre son humilité ; il montre qu'il se satisfait de l'intention de celui qu'il accueille. Quelle magnanimité dans cette tradition ivoirienne !

Le jour de son intronisation - et cela s'est répété par la suite à chacune de ses rencontres avec les rois ivoiriens - notre homme a tenu à faire savoir à tous qu'il n'était pas Alassane Dramane Ouattara mais "Monsieur le président". Comme Thôgo-gnini, il fallait donner du "Monsieur le président" dans le ton et le geste qui ne peuvent traduire qu'une profonde et totale soumission bien évidente pour tous.

En effet, pour lui, "Monsieur le président" n'est pas un titre ; c'est un nom qui représente le prestige, la notoriété, l'accession à la civilisation. Les autres devaient le savoir très vite et fortement. Lui savait bien que ce nom chargé de notoriété, il ne le doit à personne, du moins à aucun Ivoirien. Comme Monsieur Thôgo-gnini "il s'est fait tout seul ! à la force du poignet ! - et des bombes de ses amis Blancs* - Un nom qui a l'infini mérite de lui donner la grisante sensation d'être au-dessus des siens dans la mesure où il le rapproche du Blanc" (Koffi Kwahulé, Fiche de lecture).

La fragmentation de l'identité de Ouattara

Il faut comprendre que sous le modèle de Monsieur Thôgo-gnini qui se voulait à la fois lion, panthère, léopard, Alassane Ouattara s'est présenté aux Ivoiriens sous une multitude d'identités : Ivoirien, demi-Ivoirien, Burkinabé, demi-Burkinabé, Français etc... Tantôt il est né à Dimbokro, tantôt à Kong, tantôt à Sindou. Comme le personnage de Bernard Dadié, il se perd dans ses contradictions et ne permet ainsi à personne de savoir sa vraie identité. Le premier sens du mot Thôgo-gnini est bien chercher un nom ou son nom. Ouattara a effectivement passé sa vie à se chercher un village, et finalement à se chercher un nom qui ne l'attache à aucun. Un nom transcendant, sans aucune attache ethnique comme les autres Ivoiriens, sans aucune attache religieuse, historique. Oui, sa vrai identité, sera désormais "Monsieur le président". Sans passé, il ne peut être regardé que comme le présent et l'avenir.

Toutefois, retenons que le nom malinké Thôgo-gnini reprit dans les autres langues ivoiriennes a pris le sens de délateur ; c'est-à-dire qui ne prononce le nom de l'autre que pour ternir sa réputation et renforcer par la même occasion la sienne. Durant plus de dix ans, il a consacré son énergie à salir Laurent Gbagbo ; et une fois que ses amis Français ont défait ce dernier, il a pris soin de le faire déférer devant la Cour pénale internationale en l'accusant de crime contre l'humanité. Un Thôgo-gnini cherche toujours sa gloire dans la chute de l'autre parce qu'il n'a pas d'identité ou de valeur propre à montrer. Les nombreux voyages en France, les serrements de mains blanches, les invitations de ministres et de députés français aux nombreux galas et autres fêtes que son épouse organise à Abidjan ou à Paris vont tous dans le même sens : installer le nouveau nom et la nouvelle notoriété de "Monsieur le président" dans la conscience collective.

Quand il estime que c'est chose faite, comme Monsieur Thôgo-gnini, Dramane Ouattara impose le mal sans se retourner. Plein de certitudes, il n'hésite jamais. Il fait construire des prisons d'un type nouveau à Abidjan pour enfermer ses nombreux ennemis imaginaires. Il ne se pose jamais de question. Il parle et agit en son nom et tout lui obéit : on assassine, on matraque, on se suicide. Le pouvoir se confond à sa personne, l'espace ivoirien tout entier se confond à sa propre histoire.

Un nouvel homme dans le regard du Blanc

Mais Alassane Ouattara prend également grand soin à montrer aux Ivoiriens que la puissance tient aussi à l'argent qui va bien sûr de pair avec l'amour de la compagnie des Blancs. Comme Monsieur Thôgo-gnini, il tient à avoir le monopole du café, du cacao, de l'huile de palme... les produits qui alimentent l'économie française en même temps qu'ils appauvrissent aujourd'hui les Ivoiriens. Il autorise même ses amis Blancs à s'accaparer des quartiers pauvres d'Abidjan pour leurs rêves de cités urbaines futuristes, et les terres des planteurs pour des cultures nouvelles dont a besoin l'Europe ou pour enfouir les déchets toxiques français. Vous l'aurez compris : le couronnement de Dramane Ouattara est avant tout pour le peuple ivoirien une tragique confiscation du pouvoir et des biens locaux.

Quand les autres chefs d'Etat africains francophones parlent d'une nécessaire autonomie monétaire , il est le seul à clamer que "le Franc Cfa est notre monnaie", que "nous sommes autonomes" ! Il est le seul à nier l'histoire de cette monnaie, le seul à nier qu'elle est la propriété et donc l'instrument de la France pour contrôler les économies africaines et par voie de conséquence les politiques de développement des Africains francophones. Comme Monsieur Thôgo-gnini, "Monsieur le président" est le seul à s'affubler d'une valeur étrangère par souci d'être blanc. Un esclave de maison qui connaît le confort aux côtés de son maître envisage rarement d'autres voies d'épanouissement.

Paradoxalement, plus Dramane Ouattara se rapproche des Français et leur permet d'avoir la mainmise sur la Côte d'Ivoire, plus il se sent en sécurité. Il a si bien intériorisé le regard de l'homme blanc que sa couleur de peau semble lui peser lourdement. Cette peau qui lui rappelle constamment cette Afrique qu'il méprise, cette Côte d'Ivoire qui ne lui sert plus à rien, cette peau est devenue une source d'insécurité. Alors non seulement il est plus souvent en France qu'en Côte d'Ivoire, mais quand il y est il invite régulièrement ministres et députés français à le rejoindre pour qu'il n'ait pas le sentiment d'avoir quitté la France.

Ce que Dramane Ouattara ne voit pas, c'est que ce nom, "Monsieur le président" arraché avec violence et qui fait sa notoriété, est devenu aliénant puisqu'il n'est reconnu par personne d'autre que lui ; pour les Ivoiriens, il demeure celui qui cherche son nom, ou encore le délateur ou traitre ! Par ailleurs, en s'achetant pour ainsi dire une place parmi les Blancs - n'existant donc qu'aux yeux des Blancs parce qu'ils sont les seuls à le reconnaître - Dramane Ouattara se présente à nous comme un fruit qu'on attend qu'il soit mûr pour le cueillir. Exactement comme Monsieur Thôgo-gnini à la fin de la pièce de Bernard Dadié.

S'il ne voit pas ce qu'il représente aux yeux des Ivoiriens, on peut croire que Dramane Ouattara sait qu'il n'est pas aimé d'eux. Le nom - "Monsieur le président" - qu'il a arraché à force de longues luttes et qu'il a misé dans le pacte avec l'Occident l'a irrémédiablement éloigné des Ivoiriens. La prise de conscience de ce sentiment est sans doute pour beaucoup dans sa farouche recherche de la proximité des Blancs. Il doit sûrement, comme Monsieur Thôgo-gnini, pour se donner un peu de contenance ou d'assurance, se répéter souvent : "Moi, Dramane ouattara, je ne suis peut-être pas aimé, mais je suis craint, respecté [pas sûr]. Eh oui, je puis impunément faire ce qui me plaît. Demain, vous serez nombreux à être condamnés à vivre pour payer des dettes. C'est moi Dramane Ouattara qui vous le dis."

Et c'est vrai, l'ami des Blancs, le collaborateur des anciens colonisateurs ou néo-colons fait ce qu'il veut : il signe des contrats très avantageux pour eux, il leur concède des pans entiers de l'économie et des travaux publics condamnant ainsi les générations futures à être dépendantes des Français durant des décennies et des décennies. En effet, non seulement les futures générations ne pourront pas entretenir tout ce qui se construit - et qui tombera donc en ruine - mais encore elles ne pourront même pas disposer de terres pour se nourrir ou se loger parce que les étrangers se les accapareront en paiement des dettes contractées par Ouattara. Oui, "demain, vous serez nombreux à être condamnés à vivre pour payer des dettes". C'est Dramane Ouattara qui vous le dit !

* L'expression n'est pas de Koffi kwahulé mais de moi.

Raphaël ADJOBI
Dernière modification par Beauté Nubienne le mars 10, 19 8:25 pm, modifié 1 fois.
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Re: Disparition de Bernard Dadié, Illustre et Majestueux Père des Lettres Ivoiriennes

Message par Beauté Nubienne » mars 10, 19 8:22 pm

https://www.ivoirebusiness.net/articles ... de-103-ans

Côte d’Ivoire : Décès du Patriarche Bernard Dadié à l’âge de 103 ans

Publié le Samedi 9 Mars 2019.

Par Ivoirebusiness - Côte d’Ivoire. Décès du Patriarche Bernard Dadié à l’âge de 103 ans.


Décès de Bernard Dadié le samedi 09 mars 2019 à l’âge de 103 ans.
Le doyen Bernard Binlin Dadié, écrivain émérite, ancien Ministre, ancien président du CNRD et président d’honneur de la plateforme de l’opposition EDS, est décédé ce samedi à Abidjan des suites d’une longue maladie, a appris un journaliste d’Ivoirebusiness de sources familiales proches.

L’écrivain Serge Bilé a réagi sur sa page facebook :
« Quelle tristesse !! Quelle triste nouvelle !! Bernard Dadié est mort. Bon voyage tonton et merci pour tous tes écrits et pour ta droiture qui nous inspire. Tu rejoins tantie là-haut, ta chère Assamala qui t'attendait. Condoléances à mes cousins et cousines. On est ensemble. »

Âgé de 103 ans, Bernard Dadié était une figure emblématique de la littérature africaine et un ancien compagnon de lutte du Président Félix Houphouët Boigny, dont il fut l’un des ministres.

Nous y reviendrons.

Eric Lassale

Commentaires
PATRIOTES,...
PATRIOTES,
Savez-vous pourquoi le mossi mal élevé et sa diabolique dominique se préoccupent de substituer les populations étrangères aux autochtones ivoiriens avec pour but de rendre le Peuple Ivoirien minoritaire sur son propre Sol !?
La réponse à cette question qui fait froid dans le dos vient de cette vidéo :



J'avoue que le contenu de celle-ci est hyper édifiant quant au projet véritable de ce couple moralement dégénéré pour et contre la Côte d'Ivoire et son Peuple fier.
Fiers Patriotes Ivoiriens et Africains, dans notre lutte de libération et de Souveraineté nationales et continentales, nous finirons par en venir aux armes au poing.
Ce Combat passe par le Nationalisme. Ceci veut simplement dire que le peuple de chaque pays en Afrique doit se battre pour garantir l'Indépendance et la Souveraineté à sa propre Nation avec s'il le faut le soutien d'autres africains . Et doit éviter de se laisser instrumentaliser aux fins de déstabiliser son voisin.
C'est hélas ce qui est arrivé à la Côte d'Ivoire depuis 1999. Où maliens, guinéens, sénégalais, sierra-léonnais, burkinabés, nigériens, nigérians, ont accepté de jouer le rôle d'instruments de déstabilisation de l'Éburnie et de son Peuple.
Pendant ce temps à quoi assistons-nous !? En effet. Le burkina est déstabilisé. Le mali est déstabilisé. Le nigéria est déstabilisé. Hélas ! ce phénomène de déstabilisation va s'étendre à d'autres pays en Afrique du fait de notre inconscience des enjeux desservants véritablement les Intérêts de l'Afrique.
Tout comme en Côte d'Ivoire, se trouvent dans certains de ces pays des bases militaires étrangères. Cependant que les ressortissants de ces mêmes pays sont instrumentalisés en Éburnie. Y jouant un rôle très néfaste.
Alors une question me vient à l'esprit : pourquoi ces africains sous-régionaux ne combattraient-ils pas dans leurs pays afin d'y ramener Stabilité, Paix, Liberté, et Souveraineté !? Et pourquoi acceptent-ils de jouer en Côte d'Ivoire un rôle qui est par nature à la fois mauvais pour eux-mêmes, pour les Ivoiriens, et pour toute l'Afrique !? Ce qui est sûr est que ces africains qui acceptent d'être utilisés pour déstabiliser la Côte d'Ivoire sont placés devant leurs responsabilités, qui sont désormais historiques.
Je pense qu'il est temps que les Africains réfléchissent bien pour se ressaisir afin d’œuvrer pour la Liberté et la Souveraineté de l'Afrique à partir de celles de chaque pays africain. Armes au poing.
Je suis panafricainiste. Mais mon panafricanisme n'est pas synonyme de déréalisation des spécificités nationales au profit d'intérêts dont la nature se veut méprisante de l'Être Noir.

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Soumis par ANSWERING le dim, 03/10/2019 - 13:38
Repose en paix mon heros....
Repose en paix mon heros. Dieu t'a donne la longevite pour que tu nous laisses beaucoup de choses sur terre.
Nous ne te decevrons pas.
Le combat continue.

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Soumis par bringbackgbagbo le dim, 03/10/2019 - 16:17
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L'argent n'a pas d'odeur mais ça se sent quand on n'en a pas !



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