#Quatre témoignages sur les pillages, meurtres et viols érigés en mode de vie, ces derniers mois, dans l’ouest du pays #.
« Ils ont massacré mon frère »
Par Martin G.
« Un jour du mois de janvier 2003, aux environs de 22 heures, les rebelles ont fait irruption dans notre village, à Souebly, dans la sous-préfecture de Facobly. Aux environs de six heures du matin, mon grand frère, Albert, chef du village, est sorti pour se soulager. Il a été capturé par les rebelles qui lsoumis à un interrogatoire. Ceux-ci voulaient qu’il leur indique ma cachette du fait de mon statut d’ancien combattant. J’ai réussi à m’échapper en passant par la fenêtre pour me réfugier dans la broussaille jouxtant le village. De là, j’ai pu voir les rebelles exercer des sévices corporels sur mon grand frère. Ils l’ont déshabillé et l’ont traîné dans toute la ville de Facobly. Après, ils l’ont ramené au village et ont recommencé à le battre avec les crosses de leurs fusils. D’autres lui marchaient dans le ventre. Michel, alias « Zanzibar », l’un des rebelles, petit frère d’O. Zoumana, chef des rebelles de cette zone, a ordonné qu’il soit mis fin à la vie de mon grand frère, au motif que celui-ci le reconnaissait. C’est ainsi qu’ils l’ont achevé en lui portant des coups de crosse à sa nuque. Son cadavre a attendu deux jours avant d’être inhumé. Je tiens à rappeler que O. Zoumana a exigé que la somme de 2 500 francs (CFA) lui soit versée avant de remettre le corps à la famille. Cette somme lui a été versée. Je tiens également à préciser que, dans le village de Soumahé (sous-préfecture de Facobly), les rebelles ont assassiné 47 innocentes personnes. Un charnier existe entre le village de Seambly et Soakpé, dans la même sous-préfecture. Le lieu exact de ce charnier est un ravin où les rebelles entassent les corps et les brûlent. »
« Des villages rayés de la carte »
Par René G.
« Les assaillants ont attaqué Man, Bangolo, et ils ont fait irruption à Guéhibly, après quoi ils sont rentrés dans la forêt en faisant ceinture à Duékoué. Ils n’ont épargné personne de Guéhibly à Dolobly et ensuite Diouin, situé à quinze kilomètres de Duékoué. Je cite les noms de ces villages pour que vous sachiez qu’ils ne sont habités que par des animaux. Les rebelles égorgeaient tous les villageois qui retournaient dans les villages pour chercher de quoi manger. Pour finir, je voudrais bien vous signifier ceci : l’armée française stationnée dans la ville de Duékoué ne protège que les intérêts des Français dans la ville, et la population ne bénéficie d’aucune protection. »
« J’ai été kidnappée et violée »
Par Léa B.
« Je suis vendeuse d’attiéké dans le village de Gbadrou. Les assaillants sont arrivés et ont demandé à être servis. Ce que j’ai fait. Après avoir fini de manger, ceux-ci nous ont demandé de monter dans leur véhicule. Nous avons résisté mais ils ont fini par nous amener avec eux à Facobly. Là, chaque fille a été mise dans une maison particulière. Dans celle dans laquelle j’étais se trouvaient six assaillants, qui ont abusé de moi tour à tour, cela durant une semaine. Au septième jour, j’ai fait la morte. Les assaillants m’ont jetée au bord de la route. Là je me suis enfuie. Depuis ce jour, je n’ai pas encore eu mes menstrues. Je ne sais pas si j’ai le sida. »
« Ils ont tout brûlé »
Par Olivier T. D.
« Réveillé par les coups de fusil, on a pris la fuite pour notre campement qui est à sept kilomètres de notre village, en compagnie de quatre de mes petits frères et trois soeurs et six enfants. Après cinq jours passés au campement, les rebelles nous ont trouvés et nous ont dit de ne pas courir car ils veulent recruter des jeunes pour combattre les loyalistes. En nous fouillant, ils ont pris 60 000 francs (CFA) des poches de l’un de mes petits frères. Satisfaits ce jour-là, ils sont repartis et n’ont tué personne. Ce n’est que deux jours après que les rebelles sont revenus et ont tué le grand-père de ma femme, deux jeunes garçons et l’oncle de ma femme. Ils ont blessé par balle ma tante lorsqu’elle courait. Ils ont brûlé notre grenier où se trouvaient notre riz et plusieurs produits, toutes les maisons ont été brûlées. »
Propos recueillis par J. C.
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